Voici la deuxième partie de mon histoire sur mes années à Cabarete. Dans le premier article, j’avais décris la période qui avait précédé mon départ en expliquant les motifs qui m’avaient amenés à prendre cette décision. Le texte parlait principalement de mon arrivée et des difficultés que j’avais connu pour m’adapter et me faire des amis. Dans cette deuxième partie, je vais vous raconter comment j’en suis arrivée à rencontrer des gens et prendre le rythme de la vie dans les Caraïbes. Et puis, il y a aussi eu cet accident…
Partie 2
J’étais arrivée à l’appartement Dominicain depuis quelques semaines. C’était un grand contraste avec l’hôtel. Au début, je ne m’y sentais pas vraiment en sécurité. C’était loin du centre et j’avais l’impression que s’il m’arrivait quelque chose, personne ne pourrait venir m’aider. Mon cellulaire (sous loué lui aussi), ne fonctionnait pas toujours. On était en 2006 et personne n’avait de iPhone. Facebook n’existait pas encore.
L’appartement
Les voisins étaient tellement discrets que je ne savais même pas quand ils étaient chez eux. Le dépanneur d’en face avait des horaires du genre: on ouvre quand ça nous tente. De toute façon, ils avaient bien rigolé quand j’avais voulu transporter une grosse bouteille de 5 gallons d’eau jusqu’à la maison. Il m’avait regardé m’arrêter chaque 4 mètres sous le soleil de midi sans jamais venir m’aider.
J’aimais bien l’appart. C’était rustique, mais bien équipé. J’avais fait installer le câble et je regardais des vieux épisodes de Friends sous titré en espagnol. Durant la journée, il faisait trop chaud pour y être, mais le soir c’était confortable avec le ventilateur. L’électricité manquait pendant plusieurs heures chaque jour, mais j’avais une petite génératrice manuelle qui alimentait une lampe et un ventilateur.
Mon sommeil était souvent perturbé, j’avais des moustiquaires en guise de fenêtre. J’entendais tous les bruits extérieurs et ce n’était pas exactement ce à quoi j’étais habituée. Les coqs commençaient à chanter vers 3h du matin. Il m’arrivais régulièrement de prendre un p’tit cuba libre bien fort avant d’aller me coucher…
Moto, boulot, dodo
J’avais adopté une petite routine. J’allais travailler à l’hôtel, ensuite j’allais à mes cours d’espagnol. Je faisais mes courses sur le chemin du retour et quand j’avais congé, j’allais profiter de la piscine à l’hôtel. C’était bien, mais je savais que chaque soir, le centre de Cabarete devenait ce village animé qui m’avait tant charmé. Les locaux se rejoignaient pour prendre un verre après une journée de travail ou de kite. J’étais venue dans cet endroit parce que j’aimais l’ambiance, mais voilà que je n’en profitais pas.
Ma première sortie
Un soir, après mon grand cuba libre double :), je n’avais pas encore sommeil. J’ai eu un élan de motivation et je me suis dit que j’irais en ville voir si je ne croiserais pas des gens que je connaissais. Le problème, c’est que j’étais assez loin du centre et je devais m’y rendre par transport publique. Comme il y avait très peu de résidents dans ce coin, les motos taxis ou caritos étaient plutôt rare. Mais j’étais déterminée, alors j’ai commencé à marcher sur le bord de la route.
Après dix minutes, une moto s’était arrêté. Le monsieur qui m’a embarqué était vraiment très soucieux de ma sécurité… Il m’a engueulé pendant tout le trajet en me disant que j’étais idiote, que j’aurais pu me faire frapper, que c’était un pays dangereux… J’écoutais et je disais: Si Senor! Lo siento Senor!
Et j’avais débarqué devant le bar de la plage. Comme à chaque soir, c’était rempli de touristes. J’étais quand même un peu nerveuse. Ce n’était pas trop dans mes habitudes d’aller dans les bars toute seule. J’avoue que j’ai même hésité à rentrer à la maison, mais le monsieur qui m’avait amené était toujours là et il n’en serait tout simplement pas revenu de me voir faire demi tour.
J’ai donc avancé vers le bar et dès que j’ai franchi la porte pour arriver sur la plage, quelqu’un m’a attrapé le bras et m’a tiré vers la gauche! Un ami que je connaissais depuis mon dernier voyage avec mes parents me regardait avec un grand sourire, il m’invita à m’asseoir et m’offrit à boire. Je suis restée parler avec lui le temps de deux verres et je suis rentrée si heureuse d’être allée. J’étais vraiment fière de moi. La glace était brisée.
L’ami du bar
Le lendemain matin, je me réveillais et j’avais reçu un texto de cet ami qui me demandait si j’étais bien rentrée. Je me sentais soudainement plus en sécurité juste du fait que quelqu’un s’informe sur moi. Ce fut le début d’une relation plutôt étrange, mais j’appréciais beaucoup les visites à l’appartement dominicain. On regardait des films, on discutait. Je savais qu’il veillait sur moi et il se moquait souvent de ma naïveté de fille de la ville qui a encore beaucoup à apprendre sur la vie des Caraïbes. Il était Européen, mais vivait là bas depuis plusieurs années.
Le voisinage
Éventuellement, mon ami me rendait plus rarement visite parce que la haute saison arrivait et il avait beaucoup de travail. Ça se ressentait à l’hôtel aussi. J’avais finalement rencontré les voisins; deux Tchèques qui à première vue avait l’air d’être un couple. Mais finalement, je me suis rendue compte qu’ils n’occupaient même pas le même appart. La fille ne parlait pas très bien anglais, ni espagnol mais on arrivait quand même à se comprendre. Elle travaillait dans une discothèques de Sosua 6 soirs par semaine et elle finissait le boulot à 5h du matin. Ensuite, elle passait la journée à dormir dans son 1 1/2 coté soleil sans le moindre courant d’air. Je ne comprenais pas trop pourquoi elle était venue à Cabarete pour avoir ce genre de vie. Mais, c’était quand même bien de pouvoir aller à la plage avec elle de temps en temps.
Et une après midi, le garçon tchèque venu cogner à ma porte pour me demander si je parlais français. Après avoir confirmer que oui, il me demandait de le suivre. Au bout de la grande terrasse, il y avait une fille qui venait d’emménager dans l’appartement du bout. Elle ne parlait ni anglais, ni espagnol et elle avait des millions de questions. À ma grande surprise, la fille était Québécoise et elle était là pour 3 mois. Toute seule! En quelques jours, on était amies. C’était vraiment un coup de chance. Et puisqu’on était tout le temps dehors à parler et prendre un verre (et oui… la vie dominicaine), les voisins se sont naturellement joint à nous. À nous 4, on formait un genre de Place Melrose version très low budget. On se faisait des bouffes, on sortait tous ensemble et le garçon avait une voiture alors on pouvait même se déplacer le soir où quand il pleuvait.
La « pasola » (scooter)
Un jour, la fille Tchèque me raconta qu’elle avait acheté un scooter et qu’il était entreposé; elle ne l’utilisait pas. Je songeais de plus en plus à m’en procurer un parce que ça allait me rendre plus autonome. Je décida donc de l’acheter. Il était noir, tout luisant, de marque Yamaha. Je n’avais pas de permis, mais ici on s’en foutait. De toute façon, je m’étais promis de l’utiliser seulement pour le travail et les petites courses au supermercado. Mon ami du bar avait eu une réaction démesuré quand il l’avait apprit. Selon lui, c’était une décision stupide.
Aout
On peut dire que les soirées de solitudes étaient derrières moi. C’était déjà le mois d’aout qui arrivait et deux amies m’avaient annoncés qu’elles viendraient. Une d’entre elle allait rester avec moi. Et une autre de mes amies décida de venir aux mêmes dates. J’allais avoir de la visite et j’étais super contente.
C’est cette semaine là que le gouvernement dominicain décida que les bars fermeraient à minuit au lieu de 6h. Cette nouvelle était une claque sur la gueule de tous les propriétaires de bars, hôtels, des touristes et des locaux comme moi. Et mes amies qui arrivaient! Merde. C’était soi disant pour enrayer la criminalité.. À ce jour, personne n’a compris cette décision ridicule qui a été changé pour 2h du matin par la suite.
Mais Cabarete avait décidé que ça ne se passerait pas comme ça. Les gens qui possédaient des villas, des hôtels ou des terrains organisaient des gros after party et ils réussissaient à se faire commanditer par des compagnies de bière ou de rhum. Problème réglé!
Le soir où mes amies sont arrivés, on avait évidemment prévu sortir. Ce soir là, l’after party avait lieu dans un hôtel. Juste en face de l’endroit où j’avais garé ma moto sagement en me disant que j’irais la récupérer le lendemain.
L’accident
Mais, en sortant de l’hôtel.. Elle était juste là devant. J’avais conduis la moto malgré les recommandations de mon amie. Elle m’avait fait confiance. Je roulais très lentement en regardant la route parce qu’il y avait plusieurs trous immenses sur le chemin de la maison. Et j’arrivais presque à la maison quand j’ai été aveuglée par les phares d’une voiture qui démarrait. Le véhicule était stationné, mais occupait la moitié de la route. J’ai tourné pour l’éviter, mais j’ai heurté le coin et nous sommes tombées sous la moto. Mon amie paniquait, elle hyper ventilait et son genou saignait énormément. Les occupants du véhicule sont sortis et ils ont mis le scooter dans la boite arrière du camion. Ils nous ont emmenés à la clinique du village qui heureusement était ouverte 24h. C’est quand je suis arrivée à bord de la voiture, après m’être occupée de rassurer mon amie, que j’ai réalisé que de ma main jusqu’à mon coude, j’étais couverte de sang. Mes deux jointures étaient déchirées, laissant entrevoir les os.
Le médecin regarda mes doigts et il m’expliqua que j’avais probablement deux fractures à la main droite… Je suis droitière. Il fallait d’abord recoudre cette peau déchirée. À cette époque, j’avais vraiment peur des aiguilles. Je paniquais. Et comme on allait commencer, j’ai entendu la voix de mon ami du bar. Il est apparu dans la clinique après avoir entendu au village qu’une canadienne avait eu un accident de pasola. Le docteur lui a demandé de me tenir pendant qu’il allait procéder aux points de suture. Il m’a parlé doucement et m’a consolé. Ce soir là, j’ai réalisé plusieurs choses; le voyage de mon amie était gâché par ma faute, j’allais inquiéter mes parents quand ils l’apprendraient et… j’avais des sentiments pour mon ami du bar.
C’était le pire hangover de toute ma vie.
À suivre…
Partie 3 disponibles ici
Merci à Lisa Guilbault pour les photos de son appartement de Cabarete.
Articles que vous pourriez aimer:
La fois où j’ai tout quitté pour aller vivre dans les Caraïbes.